Violaine Boutet de Monvel

From video feedback to GenAI: on recursivity in the arts and media

Paul Kos

Texte d’exposition publié par Georges-Philippe & Nathalie Vallois (Paris), janvier-mars 2018.

La galerie Georges-Philippe & Nathalie Vallois a le plaisir de présenter Kinetic Landscapes (1969-2016), la deuxième exposition consacrée à l’artiste américain Paul Kos depuis Allegories and Metaphors (1968-2012) en 2012. Les paysages déserts et montagneux de l’Ouest américain constituent l’arrière-plan et la source d’inspiration de ce nouveau panorama d’oeuvres, qui comprend un ensemble de sculptures cinétiques et d’installations vidéo, ainsi qu’une sélection de photographies et de dessins.

Figure majeure de l’art conceptuel dans la région de San Francisco depuis les années 1960, Paul Kos se distingue par son utilisation dynamique de substances naturelles et sa prédilection pour de simples objets ou matériaux en rapport avec un site donné. Qu’ils se trouvent immédiatement dans l’environnement qu’il choisit d’investir, ou qu’ils soient plus largement liés au folklore du lieu-dit, ces éléments animent toujours de manière ludique et parfois même achèvent les oeuvres de l’artiste allant de performances enregistrées sur support photographique, filmique ou vidéo, à des sculptures et installations cinétiques. Au carrefour du land art et de l’arte povera, sa pratique est aussi une quintessence de l’humour qui différencie le conceptualisme sur la côte Ouest des États-Unis de son pendant plutôt austère bien qu’historiquement dominant à New York.

Alors que le sel fut la toute première substance naturelle que Paul Kos intégra dans son travail, la glace le supplanta rapidement pour devenir l’un des motifs les plus récurrents à performer, et ce souvent littéralement, dans son oeuvre. Tel est le cas ici dans The Sound of Ice Melting (1970), qui consiste en huit microphones encerclant et amplifiant le gémissement sourd d’un imposant cube de glace en train de fondre sur le sol de la galerie. Bien que l’artiste n’ait évidemment pas pu prédire au tournant des années 1970 la lutte actuelle contre le réchauffement climatique, nombre de ses oeuvres, et particulièrement celle-ci, apparaissent aujourd’hui comme si elles l’avaient toujours présagé. Un exemple plus récent inclus dans l’exposition est Kinetic Ice Flow (1969/2013), un autre bloc de glace se liquéfiant progressivement entre deux longues planches de bois et remplacé épisodiquement, tous les deux jours environ.

À côté de ce spectacle de patinage minimaliste presqu’imperceptible, de véritables paysages sauvages et périlleux sont aussi à l’honneur, par exemple dans l’installation vidéo Donner Pass (2015) représentant un lever de soleil romantique sur le lac de montagne éponyme qui fut autrefois le théâtre givré de l’expédition Donner et de son issue cannibale en pleine ruée vers l’or. Et tandis que la photographie Seracs (2016) cristallise plus loin des figurines d’alpinistes dans des petits glaçons, la température remonte plus ou moins heureusement au fil des autres oeuvres exposées. Parmi elles, l’installation Condensation of Yellowstone Park into 64 Square Feet (1969/2016) présente au sol le bouillonnement continu d’une mixture semble-t-il géothermique de soufre et de boue; la vidéo Ice makes Fire (1974) documente un jeune Paul Kos en train de tailler avec succès un morceau de glace en une loupe de fortune afin d’allumer un feu dans la neige ; et enfin, mais non des moindres, la projection grandeur nature Roping Boar’s Tusk (1971) le voit cette fois voué à l’échec alors qu’il tente d’attraper à l’aide d’un lasso un cône volcanique érigé à l’horizon.